L’Eurêkafé, des sciences, mais comme à la maison !
Et si vous vous arrêtiez à l’Eurêkafé ?
© Eurêkafé.
Aujourd’hui, ce n’est pas seulement une personne de la communication scientifique que j’ai envie de vous présenter, mais bien un lieu. Je dirais même presque, un tiers-lieu. Il s’agit de l’Eurêkafé, un salon de thé en plein centre de Toulouse, qui a vraiment décidé de rendre les sciences accessibles, et surtout conviviales.
Imaginez-vous : installé.e bien confortablement dans un épais fauteuil, sirotant votre boisson préférée, tout en écoutant un.e scientifique passionné.e vous parler du Big Bang. Le must, à la fin, vous échangez avec iel en partageant une part de brownie. Voilà, c’est ça l’Eurêkafé. Tout le monde est invité et tout le monde s’y retrouve….
Pour nous en parler plus en détails, j’ai discuté avec Arnold Oswald, l’un des co-fondateurs de cet endroit chaleureux.
Qu’est-ce qui fait le succès de ce lieu ?
Une découverte de la communication scientifique
Mais d’abord, chef de chantier !
Comme beaucoup des personnes que j’ai rencontrées, Arnold a découvert la communication scientifique un peu par hasard.
C’est souvent le cas, cette découverte s’est faite pendant ses études. Il a d’abord commencé avec des études d’ingénieur à l’école ENSAM (École Nationale Supérieure des Arts et Métiers) de Bordeaux. Il a ensuite poursuivi avec un double diplôme de l’École Polytechnique de Montréal. C’est une école d’ingénieurs généralistes, l’une des meilleures écoles publiques du Québec. Arnold y a alors réalisé un projet de recherche sur 2 ans (une sorte de mini doctorat).
Ce projet de recherche, outre l’aspect scientifique, intéressait particulièrement Arnold. En effet, lorsqu’il est arrivé, il était véritablement le premier étudiant d’un tout jeune chercheur. Il fallait donc construire littéralement le laboratoire, créer les plans, les installations… (prises électriques, câbles…). Cela lui a particulièrement plu et lui a donné confiance sur des projets de petite construction et d’aménagement. Le projet de l’Eurêkafé commençait déjà à naître…
Puis expérimenter la communication scientifique
Cependant, avant de pouvoir lancer ce projet, il fallait attendre Samuel. C’est le meilleur ami d’Arnold et son futur associé dans la création de l’Eurêkafé. Or, pour lancer le projet, il fallait qu’il finisse aussi ses études…
Cette attente n’a pas été une perte de temps pour Arnold, bien au contraire ! Il a pu découvrir et expérimenter la compétition FameLab. Nous sommes alors en 2016, et Arnold a choisi de ne plus seulement regarder du contenu de vulgarisation scientifique sur YouTube, mais de passer de l’autre côté de la barrière. Il s’est donc inscrit à l’édition française où il a gagné la finale ! Il a pu donc partir pour la finale internationale en Angleterre…. Une très belle expérience ! On parle alors de 31 pays participants et la rencontre de personnes aux parcours divers, mais avec une même passion pour le partage de savoir.
Cette expérience FameLab était donc vraiment très enrichissante pour Arnold et l’a encore plus motivé à monter son projet de café, salon de thé basé sur le partage et les savoirs. La petite « fun fact » de ce concours : lors de la finale française, Arnold ne le savait pas encore, mais tous les futurs collaborateurs de l’Eurêkafé étaient déjà présents ! Samuel, Agatha Liévin-Bazin (alias le Nid de Pie) et Tania Louis assistaient à la finale, sans savoir qu’ils travailleraient ensemble plus tard…
L’Eurêkafé, d’abord un café convivial, mais pas que…
Pourquoi créer un café de sciences ?
© Eurêkafé.
Lorsqu’il était au Québec, Arnold organisait des soirées avec des amis. Chacun partageait des sujets d’intérêt, plutôt en lien avec les sciences. Cependant, ils étaient trop nombreux pour se réunir dans le logement de l’un d’entre eux, ils se retrouvaient donc… dans un café ! En outre, le paiement ne se faisait pas à la consommation, mais au temps passé. Le business model de l’Eurêkafé était alors tout trouvé !
Cependant, le but n’était pas d’avoir un « simple » café, un « simple » établissement alimentaire. Il fallait un petit quelque chose en plus, un véritable concept. Or, Samuel et Arnold souhaitaient s’investir dans un projet entrepreneurial à visée scientifique. Ils ont eu plusieurs idées, dont un potentiel escape game, mais c’est trop compliqué de varier les sujets. Contrairement à un café, avec des événements différents…
Ils n’avaient cependant pas non plus envie de se lancer dans la grande restauration. La formule du café à l’heure est moins intense en termes de restauration. Cela laisse donc plus de temps pour le culturel. En outre, pour Arnold et Samuel, ce qui devient finalement le plus important, c’est l’aspect convivial. Il fallait créer un endroit où les personnes peuvent se retrouver. Un endroit où on lève les barrières entre publics et sciences et où, donc, les sciences sont vraiment accessibles. Vous comprenez mieux maintenant pourquoi j’ai parlé de « tiers lieu » dans l’introduction…
Certes, les sciences et les savoirs sont importants, mais il ne fallait pas non plus que ça prenne le pas sur la convivialité. Pour cela, Arnold et Samuel évitent de mettre trop en avant les sciences sur les enseignes ou lors de la première rencontre. Ils veulent éviter de rebuter les personnes qui pourraient ne pas se sentir concernées. L’Eurêkafé doit d’abord être un lieu convivial où l’on passe un bon moment. Finalement, un peu par hasard, on tombe sur la programmation (trop chouette soit dit en passant) et on choisit de participer à une conférence !
Un tiers lieu plein d’avantages et de promesses
Si vous entrez dans ce café, vous apprécierez déjà le décor et l’ambiance. Les fondateurs les ont en effet bien réfléchis. Le but est de créer un décalage avec un café « standard » et avec un espace de transmission de savoirs. Le but est de permettre aux usagers d’être plus à l’écoute, mais aussi plus à l’aise. Il faut qu’ils se sentent comme à la maison ! C’est une manière pour que les usagers puissent oser poser des questions.
Cette ambiance permet des échanges de qualité. Les publics s’investissent dans les discussions. Ils osent parler, même avec des conférenciers un peu « célèbres ». L’Eurâkafé crée ainsi quelque chose de très horizontal. Le conférencier est vraiment inclus avec le public. Cela nivelle l’ambiance et enlève les barrières.
Enfin, l’Eurêkafé est un lieu physique. Il est bien ancré à un endroit, au cœur de Toulouse et ouvert très souvent. C’est donc facile de s’y rendre et d’en profiter. Il devient d’ailleurs un véritable lieu de rencontres. D’heureux hasards se créent lorsque les usagers se retrouvent, échangent… Des projets naissent, mais aussi quelques couples…
Un tiers lieu où l’on ne risque pas de s’ennuyer
© Eurêkafé.
Vous l’aurez compris, l’Eurêkafé est un lieu original. Et à plus d’un titre, vous pourrez aussi profiter de la diversité des utilisations et activités possibles. Il y a finalement plusieurs Eurêkafé !
En semaine, on peut venir se poser et se servir en petites douceurs. L’idée est de pouvoir faire des jeux ou lire (le café propose des jeux de société et des livres). On peut juste venir y faire une pause, respirer dans la journée entre deux réunions ou une sortie shopping endiablée. On peut aussi y travailler, le WiFi est bien présent, ce qui attire tout autant les étudiants, que les indépendants ou les chercheurs…
Et enfin, il y a bien sûr les événements ! Presque un par soir, des rendez-vous, des événements uniques… Il y en a pour tous les goûts : café-débat, quiz, clubs de jeux, lectures, masculinités alternatives…
L’Eurêkafé, un espace multiple
Un tiers lieu qui plait
Le café existe depuis 2018 et, même s’il a traversé une vague de turbulences avec la pandémie, il plait ! Certains habitués vont même passer plus de temps sur place que les personnes qui travaillent véritablement pour le café ! Ils adorent le lieu : ils sont chez eux.
L’expression « havre de paix » revient souvent parmi les usagers pour qualifier le café, surtout en semaine. Grâce à son côté tranquille, chacun peut vivre à son rythme et se poser comme il le souhaite. Les usagers se sentent bien, ils peuvent être eux-mêmes.
Ce n’est pas aussi facile d’avoir les retours sur les événements, car il y en a beaucoup et surtout beaucoup de différents. Cependant, l’ambiance reste en général très « cool ». Il est toujours possible de discuter, avec les intervenants et entre personnes du public.
Pas un, mais des Eurêkafé
Il y a un peu plus d’un an aujourd’hui, l’Eurêkafé a déménagé. Il y a deux raisons principales, l’une purement économique, l’autre conceptuelle.
Tout d’abord, l’adresse première était beaucoup plus chère. L’endroit était certes plus passant, mais le loyer très élevé, avec les confinements c’était donc beaucoup trop compliqué. Ces périodes d’arrêt forcé ont permis une reconfiguration et un renouveau. Samuel a souhaité poursuivre un projet professionnel et de vie qui lui tenait à cœur et à donc confier les rênes à Arnold. Ce dernier a trouvé une autre personne pour l’accompagner, Nicolas, et tous deux ont cherché un nouveau local.
C’est là qu’ils ont trouvé cette fameuse nouvelle adresse : 5 Impasse Colombette, juste à côté de Jean Jaurès, au centre de Toulouse. Un endroit qui, en plus d’être moins cher, correspond mieux au concept de l’Eurêkafé. Grâce à ses 3 salles entourant une charmante petite courette (accueillant une terrasse et une belle fresque), il est maintenant possible de faire cohabiter plusieurs utilisations différentes du café. On peut même accueillir des structures qui souhaiteraient privatiser l’un des espaces, sans pénaliser les utilisateurs « classiques ».
Des projets plein la tête pour un espace aux belles promesses
Arnold et sa polyvalence
Pour Arnold, ce projet est une belle aventure. Cela lui a beaucoup plu (et lui plaît toujours) de tout créer, designer les meubles, penser les espaces… C’est aussi un véritable moyen d’assouvir sa grande curiosité scientifique. L’Eurêkafé est un espace de tests grandeur nature. Que ce soit en termes d’animations, d’événements, d’invités… On peut tout essayer et voir en direct le retour des usagers.
Il y a, bien sûr, des tâches bien définies qui doivent être remplies. Arnold gère un commerce, ce qui signifie être très polyvalent ! Il faut tenir le café, accueillir les personnes, assurer la logistique, le ravitaillement… Cela comprend aussi l’entretien des lieux physiques, ainsi que l’administratif. En outre, qui dit événements, dit aussi programmation ! Cependant, cette partie, Arnold la délègue de plus en plus à Nicolas, qui gère aussi la communication et les contenus des soirées qu’il faut préparer et animer.
Dans tous les cas, ce qui est important c’est de continuer à créer des ponts entre chercheurs et grand public, entre des gens qui se rencontrent. C’est ça le but de l’Eurêkafé : voir les liens humains qui se créent…
Et le futur de l’Eurêkafé ?
À l’horizon moyen terme, le but est d’acheter les murs. Les propriétaires sont en effet très enclins à leur vendre, cela va dépendre aussi des résultats de cette année 2023.
Nicolas et Arnold aimeraient aussi mettre en ligne les événements. Le but serait de les capter et de les diffuser en direct, cependant c’est un stress supplémentaire : Arnold et Nicolas sont seuls sur les événements du café… Une troisième personne serait bienvenue, mais il faut les budgets. Dans les tâches administratives, il y a donc aussi la réponse à des appels d’offre.
Enfin, Arnold aimerait faire des émules. Plusieurs personnes s’intéressent au café, à son concept et ses promesses. Puisqu’il ne se sent pas prêt à se lancer dans une « franchise », il n’hésite pas à conseiller les personnes qui souhaiteraient ouvrir leur café à thème. Et si c’était vous ?
© Eurêkafé.